mardi 31 mars 2020

Littérature et Cinéma - Article N°1


Hey les Choupinous ! Série d'articles quelque peu différents qui débute aujourd'hui puisque je vais vous parler de films relativement anciens que j'ai visionné pour mon cours de Littérature et Cinéma . Petites précisions supplémentaire avant de démarrer mes avis : 1) ces films sont , pour la plupart , en noir et blanc ; 2) je n'ai pas lu les synopsis ni vu les bandes annonces avant de regarder ces oeuvres de manière à garder la découverte totale au moment du visionnage .

Sommaire :

Article N°1 :
Fritz Lang, Man Hunt [Chasse à l’homme], E.-U., 1941. 
Jacques Tourneur, Cat people [La Féline], E.-U., 1942.

Article N°2 :

Kenji Mizoguchi, Sancho dayu [L’Intendant Sancho], Jap., 1954.
Akira Kurosawa, Shichinin no samurai [Les sept Samouraïs], Jap. 1954.

Article N°3 :

Clint Eastwood, Letters from Iwo Jima , E.-U., 2006.
Terrence Malick, The Thin Red Line [La Ligne rouge], E.-U., 1998.

Article N°4 :

Carl Theodor Dreyer, Vampyr, ou l'étrange aventure d'Allan Gray, Fr., All., 1932.
Max Ophüls, Madame de, Fr., 1953.
Elia Kazan, Splendor in the grass [La Fièvre dans le sang], E.-U., 1961.



Man Hunt est un film de propagande anti-nazi qui , si je ne me trompe pas , a été réalisé alors que les États-Unis n'étaient pas encore impliqués dans la Seconde Guerre Mondiale . C'est donc une oeuvre cinématographique qui met en scène un type bien précis de personnages allemands qu'on retrouve dans la plupart des autres films de ce genre , c'est à dire des nazis menaçants (aux visages désagréables , au ton de voix agressif) , machiavéliques (ils piègent , manipulent , tuent , etc.) et grotesques (grand et maigrelet ; maladroit et portant un chapeau melon) . Ainsi , Man Hunt montre aux spectateurs que 1) les nazis viennent jusque chez eux pourchasser l'un des leurs et qu'ils faut donc les arrêter à tout prix et que 2) ils ne sont pas aussi forts qu'ils pourraient le croire puisque le héros de cette histoire arrive à les vaincre . On mobilise les troupes tout en leur donnant de l'espoir .

Man Hunt débute avec ce célèbre enchaînement de scènes sans dialogue qu'on retrouve dans de nombreux "vieux films" tout comme dans la plupart des épisodes de Columbo . Cependant , silence ne rime pas forcément avec ennuie , la preuve ici avec ce démarrage efficace qui intrigue fortement , tout d'abord parce qu'on se demande qui le protagoniste peut bien être en train de "chasser" puis parce qu'on comprend que la réponse est Hitler . 
Un autre point m'a également intrigué , mais pour des raisons bien différentes , il s'agit des bruitages étranges utilisés lors de certaines scènes . En effet , lors du passage "le chasseur se retrouve lui même chassé" au début du film , les aboiements des chiens ressemblaient à des sons de canards ou de klaxon et , dans une autre scène où le héro se trouvait sur les quais , le moteur du bateau en arrière plan faisait un bruit similaire à celui d'un portable en mode vibreur... Hormis ces quelques détails cocasses et plus amusants que réellement perturbants , j'ai trouvé la réalisation et la photographie du film réussies et j'ai particulièrement apprécié l’esthétisme créée grace à l'utilisation de différentes teintes de gris . 
L'histoire est simple mais efficace et intéressante à suivre et les nombreuses scènes de course poursuite sont très bien rythmées . Néanmoins , bien que je les ai apprécié , je dois bien avouer que je ne me suis pas vraiment attachée aux personnages . Si les allemands sont de grands vilains machiavéliques , les anglais ont le cœur sur la main ! Le héros fait deux très belles rencontres , la première en la personne d'un jeune garçon qui travaille sur un bateau et qui , sans le connaitre et sans rien lui demander en retour , est prêt à se mettre en danger pour l'aider , et la seconde en la personne de Jerry , une jolie jeune femme extrêmement peu rancunière puisqu'elle accepte de lui prêter le peu d'argent qu'elle possède alors qu'elle ne le connait pas depuis plus de cinq minutes et qu'elle a toutes les raisons de se méfier de lui au vu du fait qu'il l'a pour ainsi dire prise en otage afin d'échapper à ses poursuivants... Pas forcément la meilleure des premières impressions , n'est-ce pas ? Pourtant Jerry se met rapidement à craquer sur lui (d'autant plus quand elle découvre que cet un gentleman riche et puissant) et devient une alliée fidèle , toujours prête à l'aider même si pour cela elle doit se faire passer pour une prostituée ou mourir . Quant à notre héros , il est intelligent , courageux et à une manière de penser intéressante (j'ai apprécié sa réflexion sur la chasse : la poursuite d'un "animal" est un sport , sa mise à mort n'est que pure barbarie et cruauté gratuite !) mais il n'est pas vraiment féministe (bon en même temps c'est l'époque qui veut ça , que voulez vous...) . En fait , au final , il m'a surtout rendu l'image d'un gentleman friqué qui propose d'offrir de l'argent à tout va , qui infantilise Jerry en l'appelant son "petit singe têtu" , sa "sangsue pleurnicheuse" ou encore son "enfant" et qui parle de sa sécurité tout le temps tout en la mettant quand même en danger en allant se réfugier chez elle et en lui demandant son aide quand il est dans la galère... 
Je ne me suis donc malheureusement pas sentie aussi concernée par le sort de ces personnages que je l'aurai voulu et je ne me souviendrais probablement plus d'eux dans quelques temps . Toutefois , quatre scènes de ce film ont réussi à me séduire et à me marquer , et c'est donc ce que je retiendrais de Man Hunt : sa scène d'ouverture (dont j'ai déjà parlé) , la scène de poursuite dans le métro , le dialogue entre Thorndike et le héro emprisonné dans son propre abri , et la scène de fermeture (avec l'émouvant hommage à un certain personnage mort avec la flèche dessinée sur l'avion du héro qui sait désormais pourquoi il "chasse" ; ici à lieu la naissance d'un héros de guerre alors que les jours sombres ne font que commencer...)

Conclusion : Quelques bruitages étranges , un petit manque de profondeur dans les relations entre les personnages et une impression que tout se déroule un peu trop vite (en tout cas à mes yeux) , mais tout cela est facilement compensé par la qualité de la réalisation et de la photographie et par l'intensité et l'intelligence de certaines scènes mémorables . Un très bon film de propagande anti-nazi !




Cat People est un film petit budget qui ne dure qu'une heure douze mais cela ne l’empêche en rien d'être de qualité . Tout d'abord , j'ai apprécié ce que j’appellerai la "justification des musiques de fond" , je m'explique : la grande majorité des musiques du film ne semblent pas rajoutées au montage pour créer une ambiance mais belle et bien intégrées directement dans les scènes qu'elles accompagnent , ainsi on peut voir un musicien de rue passer rapidement à l'écran , un petit orchestre joué en arrière plan d'un diner , l'héroïne siffloter et chantonner , ou encore un ouvrier chanter en travaillant . Deuxièmement , j'ai trouvé l'actrice Simone Simon parfaite pour son rôle , et ce principalement parce que son visage a quelque chose de très félin qui donne une dimension encore plus fantastique et surnaturelle à son personnage de femme-panthère . Et puis , j'ai totalement adhéré à ce style minimaliste , tout en suggestion , qui arrive à créer une certaine angoisse chez le spectateur sans pour autant montrer quoi que ce soit d'effrayant .

Dès la scène d'ouverture , on sent bien que quelque chose d'étrange et de sombre flotte autour de l'héroïne lorsqu'on la voit observer avec intensité une magnifique panthère noire enfermée dans une petite cage au milieu de la ville . Cette première impression se renforce d'autant plus lorsque , après s'être laissée draguer , dans un geste de fausse modestie , elle laisse son dessin représentant cette panthère poignardée s'envoler . Cette héroïne , dont le parfum chaud (fauve peut être même) , et non pas floral et délicat , embaume son appartement , n'hésite pas à inviter un homme qui lui était inconnu quelques instants auparavant chez elle ; détail qui pourrait s'expliquer par une nécessité d'avancer rapidement à cause de la courte durée du film mais  qui pourrait également être un signe révélateur du coté prédateur de l'héroïne . Coté qui se devine à nouveau par la suite lorsqu'elle chantonne près de sa fenêtre et que des rugissements semblent lui répondent , lorsqu'elle entre dans une animalerie et que les animaux s'agitent ("on peut tromper n'importe qui mais pas un chat" dit la vendeuse) , lorsqu'elle s'amuse à essayer d'attraper le canari et que , le voyant mort , elle le donne à manger à la panthère , ou encore lors des scènes où elle poursuit sa rivale et sur lesquelles je reviendrai par la suite .
En supplément de cette héroïne plus que mystérieuse , Cat People met en scène une histoire de sorcellerie qui contribue fortement à l'établissement d'une ambiance fantastique et angoissante . Tout commence lorsque l'héroïne décide de raconter une légende tout droit venu de son village , impliquant des prières à Satan , des femmes se transformant en panthères lorsqu'elles sont dépassées par leurs émotions négatives et un héro transperçant un chat car ce dernier est la représentation du mal . Puis , plusieurs scènes font écho à cette légende comme celles où une autre femme aux traits félins s'adresse à l'héroïne comme à une sœur dans un dialect de son village natal , ou bien celle où le "gars qui nettoie devant la cage" affirme que la panthère est une creature maléfique ayant un rapport avec l’apocalypse . 
Ce qui pourrait ne ressembler qu'à une simple superstition devient petit à petit une possible maladie mentale de l'héroïne avant de se révéler être en réalité un mal profond ancré dans son âme . Au départ , ce mal n'est pas spécialement handicapant , il a même l'avantage de la convaincre de prendre son temps dans sa relation avec le bel inconnu qui lui a volé le cœur (non parce qu'il faut bien avouer qu'avant que commencent ses angoisses sur ce passé qui viendrait la hanter leur relation avançait suuuuper vite O_o... toujours ce problème de courte durée du film ou alors est-ce qu'il y a eu une ellipse non précisée ou que je n'ai pas repéré ? aucune idée) . Ce mal amplifie et Irena se retrouve effrayée par ses pulsions , elle décide donc de "faire face intelligemment" à tout cela en allant consulter un psy... psy conseillé par la collègue féminine de son désormais mari... son mari raconte donc ses problèmes personnels à une autre femme... vous voyez de quel genre de "type bien" il s'agit ? Je ne supporte pas ce gars ! Le personnage est énervant et l'acteur manque cruellement de charisme ce qui n'arrange rien >_< ; enfin bref , revenons en au sujet de base . Lors de la première séance d'Irena chez le psy , on se retrouve face à son visage éclairé de lumière , tout le reste autour d'elle n'est qu'obscurité , et j'ai trouvé que cela apportait un aspect mystique à ses déclarations , cela ressemblait presque un rituel plutôt qu'à une consultation . Dans un premier temps , le personnage du psy apporte des explications rationnels aux éléments étranges qui se déroulent , faisant ainsi pencher la balance du fantastique vers le coté de l'étrange , du naturel . Il explique à Irena que la fixation qu'elle fait sur la clé permettant d'ouvrir la cage de la panthère représente sa tentation de libérer le mal , de le laisser se déchaîner , mais aussi son propre désir de mort ; elle représente sa peur de la panthère mais également son attirance pour elle , son envie d'en faire un instrument de mort . Mais cette psychanalyse n'est-elle pas vouée à l’échec dès le départ car , si Irena semble sincère dans sa démarche , on ne peut pas vraiment en dire autant de son thérapeute qui , loin de se montrer professionnel , ne pense qu'à une chose : la faire succomber à son charme . Toujours en est-il qu'il avait au moins raison sur un point : le voile de la mort poursuit bien Irena . 

Si le mal qui touche l’héroïne semblait pouvoir s'expliquer de manière rationnelle par son psy , la suite des événements nous prouvent que ses hypothèses étaient fausses et le film bascule alors définitivement vers le merveilleux , le surnaturel . 
Irena succombe de plus en plus profondément à son mal au fur et à mesure que sa jalousie , que son envie , et probablement aussi que ses pulsions sexuelles qu'elle tente de refouler , augmentent . Dès le début du film , elle avoue sans problème qu'elle "aime plaire" et qu'elle "envie toutes les femmes qu'elle croise dans la rue" , on se doute donc bien qu'elle réagira forcément mal en apprenant que son très cher mari se rapproche d'une autre derrière son dos . Et , en effet , elle se met rapidement à harceler au téléphone sa rivale et à la poursuivre tel un prédateur , ce qui donne lieu à de très belles scènes aussi esthétiques qu'angoissantes . La première montre la proie remonter le col de son manteau en frissonnant de froid mais aussi et surtout de peur en pensant apercevoir un chat noir sur la route (ce que j'ai trouvé un peu étrange vu qu'elle a elle même un chat noir pour animal domestique mais bon laissons ça de coté ^^") , il s'agit en réalité de l'héroïne qui , cachée dans l'ombre , la suit , la chasse . La rivale se transforme en potentielle victime traquée par un mal qu'elle ne peut pas voir mais qu'elle sait pourtant exister et , bien qu'elle s'en sorte indemne grâce à la lumière d'un bus qui vient effacer les ténèbres qui l'encerclaient , le spectateur sait qu'elle a probablement échappé au pire en découvrant les traînées de sang reliant les moutons dévorés à Irena . Dans la seconde scène , on retrouve le coté voyeurisme de l'héroïne qui se cache une nouvelle fois dans l'ombre pour observer son mari et sa rivale lors de leur sortie au musée . Les deux observés sont collés l'un à l'autre et teintés de blanc (ou de couleurs claires) tandis qu'Irena qui porte des habits sombres reste en retrait et les regarde d'un mauvais œil , tel un prédateur près à se jeter sur eux à tout moment . Finalement , elle laisse son mari tranquille et décide d'uniquement poursuivre sa concurrente en amour jusqu'à une piscine où , pour la première fois il me semble , se font entendre ses rugissement de panthère dans un sublime ballet de jeu d'ombres , de clairs-obscurs . Lorsque les lumières se rallument , tout laisse penser à une hallucination , à un mauvais rêve , tout sauf le peignoir de la rivale déchiré en lambeaux... 
Voilà , je m’arrête là , je n'analyserai pas la fin du film pour ne pas tout vous dévoiler , comme ça il restera une part de surprise si vous décidez de le regarder ^o^ (et puis de toute façon mon avis est déjà bien assez long comme ça ^^") .

Conclusion : Un film court à petit budget qui joue sur la subtilité et l’ambiguïté du genre fantastique pour attiser l'angoisse et l’intérêt du spectateur . Une excellente surprise pour moi !



Annyeong  ~



Have fun , Emi-chan <3

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